Les arômes (artificiels) ?

Attention, cet article date de 5 ans, les informations peuvent ne plus être à jour...

Qu’est-ce qu’un arôme ?

Un arôme c’est une odeur.
Une odeur c’est une perception.

Comme tout ce qui existe, ce n’est pas magique. Il faut forcément qu’il y ait un vecteur de l’information, un truc qui se déplace ou qui se mesure. Et ce quelque chose ici c’est une molécule, c’est-à-dire quelque chose de concret, une des briques élémentaires du vivant et du monde qui nous entoure.
Tout, autour de nous (et même nous), est composé d’atomes, absolument tout !
Ces atomes, sont liés les uns aux autres en chaînes qu’on appelle des « molécules ». Chaque molécule a une forme qui lui est propre et a des effets plus ou moins divers avec d’autres molécules.
Pourtant, si vous essayer de sentir du verre, l’air, du sucre ou du sel ça n’aura pas d’odeur….
Pour qu’il y ait une odeur, il faut que la molécule qui donne cette odeur arrive dans notre nez. Ça semble logique.
Mais il y a aussi le fait que toutes les molécules n’ont pas d’odeur, ou du moins, pas pour nous…

On sent constamment des odeurs, et les percevoir peut avoir plusieurs utilités, comme par exemple, indiquer la saison, savoir s’il y a de la nourriture à proximité, savoir si cette nourriture n’est pas toxique car infectée/pourrie…

On peut sentir les odeurs aussi bien par le nez en reniflant (voie dite « ortho-nasale ») ou en mangeant (les odeurs – et donc les molécules – de l’aliment qu’on a en bouche passent par la gorge, remontent dans le nez (voie dite « rétro-nasale », on parlera plutôt de « goût » dans ce cas).
Dans les 2 cas, les molécule finissent leur trajet dans une partie du nez qu’on appelle la « muqueuse olfactive » constituée de plein de récepteurs qui proviennent directement de neurones du cerveau. Notre odorat n’est donc qu’une partie externe du cerveau.
Petite expérience à faire chez soi : Essayez de sentir un fruit en bouche en reniflant et vous verrez que vous ne sentirez rien ;).

Lorsque l’on sent un fruit ou un aliment, il arrive parfois qu’il ne sente pas grand chose jusqu’à ce qu’on le croque et là… Paf ! C’est l’explosion d’odeurs et de saveurs ! Ça s’explique parce que les molécules responsables des odeurs sont bloquées dans le fruit et sont libérées lors de la mastication (en cassant les cellules ou en réchauffant avec la chaleur de notre bouche – plus c’est chaud et plus les molécules s’évaporent).
Certaines molécules se transforment aussi chimiquement par des réactions avec certains composés de la salive (les enzymes, les petits outils de travail de notre corps) pour créer des molécules qui elles, seront odorantes.

Mais vous savez le plus drôle dans tout ça ? C’est que c’est notre cerveau qui interprète les odeurs ! À la différence avec une intensité lumineuse, une onde sonore, le pH… qui sont mesurables, une odeur ne l’est pas, simplement parce que c’est notre cerveau qui « imagine » une odeur. On ne sait pas trop comment ça marche mais je trouve ça marrant de se dire qu’en fait les odeurs sont dans nos têtes !
Et là, la question brain-fuck : comment être sûr qu’on sent les mêmes choses que les autres… ? On est tous capable d’identifier de la banane mais est-ce qu’on sent vraiment la même chose ? Mystère… Mais a priori oui ;)

Nous sommes naturellement attirés par certaines odeurs, notamment alimentaires, pour notre survie. Et nous en rejetons d’autres également par survie, tout ce qui peut toucher aux fèces par exemple.
Plus une molécule est importante comme signal d’alerte, plus on sera sensible à la sentir et moins il en faudra dans l’air pour qu’on la repère.

On associe donc une odeur à un animal/objet/aliment et on sait instinctivement si cette odeur – et donc ce à quoi c’est lié – a un bénéfice ou un risque pour la santé et la survie.

Quand on mange un fruit par exemple, on ne ressent en réalité pas un arôme mais plusieurs ! Des dizaines voire des centaines ! L’ensemble de ces arômes est responsable de la représentation qu’on a du fruit, par exemple une banane.
L’odeur de banane n’est pas simplement une seule molécule – et donc une seule odeur – mais un ensemble de molécules et donc un ensemble d’odeurs, ressenties plus ou moins fortement, plus ou moins longtemps et qui nous donne l’odeur de la banane en fruit.

Pour s’en rendre compte facilement, il suffit de manger un yaourt aromatisé à la banane ou un bonbon banane. Ça sent la banane mais… Pas tout à fait.
On sent le « synthétique », on sent en réalité que ce n’est pas le fruit mais une pâle copie simplifiée ou un truc qu’on a associé avec le temps a de la banane. On parle dans ce cas « d’arôme » de banane.
On sait aussi que c’est censé être de la banane parce que c’est marqué sur le pot et qu’on s’attend à sentir de la banane. On est aussi conditionné depuis petit à associer cette odeur synthétique à de la banane. Mais on ne va pas se mentir, ça sent tout sauf la banane !

Faites le test : mettez un yaourt de banane dans un pot rouge et un yaourt de fraise dans un pot jaune (en les inversant par exemple en nettoyant bien les pots entre temps), vous verrez que la personne qui goûtera, dira que le premier est à la fraise et l’autre à la banane… C’est dire à quel point on nous manipule en se jouant de nos sens avec la vision, et à quel point ses arômes factices sont loin d’être parfaits !
Le pire pour moi est l’arôme de kiwi qui ressemble juste à rien.

Comment est fabriqué un arôme ?

Comme on vient de le voir, un arôme n’est qu’une molécule ou un ensemble de molécules présent dans différents milieux (les fruits, les plantes, l’air…) et ils sont donc créés biochimiquement, naturellement, par l’organisme en question.
Certaines molécules ont un rôle répulsif contre des nuisibles, d’autres servent de messages entre différents individus, d’autres sont hormonaux…
Il n’y a pas qu’un type de molécules ni un type définit de fonction à ces molécules, puisque de toute manière, l’odeur n’est que dans notre tête.
Le lien entre le rôle d’une molécule et son odeur est complètement indépendant.

D’autres sont créés de manière artificielle, par exemple le goût de « caramel » lors de la cuisson du sucre. C’est une création chimique (dans le sens de réaction chimique) mais qu’on retrouve dans pas mal d’aliment qu’on cuisine soit-même dès l’instant où du sucre est chauffé et réagit avec d’autres sucres ou des protéines.

Les phénomènes de torréfaction aussi par exemple favorisent la création d’arômes, les goûts du cacao ou du café ne sont pas du tout comme ça à l’état naturel et mieux, en fonction du savoir faire du torréfacteur et de l’extraction, on aura des arômes différents ! La maîtrise de la transformation va faire ressortir le mieux possible des arômes contenus directement ou indirectement dans les fèves.

On peut aussi ajouter les arômes de type « fumé » pour certaines charcuterie ou poisson par exemple (pour la culture, on classe ces arômes dans la catégorie « empyreumatique« , c’est bien pour le scrabble !)

Les arômes sont partout et c’est ce qui fait qu’on aime tel ou tel aliment (en plus de sa texture, de son ressenti sucré, amère, etc) et qu’on recherche ! Il y a un lien étroit entre les souvenirs et les goûts/odeurs.

Cependant, il n’est parfois pas possible d’extraire les arômes de sa source sans en extraire d’autres mauvais en même temps, ou parce que la source de l’arôme est chère (fruits ou fleurs rares, molécule faible en concentration, etc).
Par exemple, pour obtenir 30 à 80g d’huile essentielle de rose de Damas ou de violette, il faut une tonne de plante fraîche. D’un point de vue écologique et économique ce n’est clairement pas rentable et très mal vu.

Pour palier à ça, on peut donc les créer de manière artificielle avec des composés de départ plus simples (de manière chimique généralement) ou en utilisant des techniques employant des organismes qui n’ont rien à voir avec l’aliment qui a l’arôme en question dans la nature, ou encore ne prendre que les arômes les plus marquants, etc.
Mais, en fin de compte, n’est gardé que l’arôme, donc la molécule, qu’importe sa méthode de fabrication, c’est une molécule purifiée.
Les composés créés peuvent être les mêmes que ceux existants dans un fruit par exemple (dans ce cas, on ne fait « que » copier une partie des arômes), ou complètement nouveaux et n’existant pas dans la nature (ou qu’on ne connaît pas… Après tout, tous les goûts sont dans la nature ;) ).

De plus, attention aux appellations « Arômes naturels », naturels oui mais pas produit par ce qu’il devrait être. Mais pas néfaste pour autant.

Pourquoi utiliser des arômes artificiels

L’intérêt premier est purement industriel et permet d’avoir un produit stable, aussi bien dans la conservation dans le temps (un produit qui se garde, donc qui ne moisit pas rapidement ou qui garde son aspect et ses goûts le plus longtemps possible) qu’en reproductibilité (la grande difficulté en process alimentaire c’est d’avoir toujours le même produit afin que le client (nous tous) retrouvons LE produit qu’on aime.

Beaucoup de process alimentaires industriels détruisent les arômes ou les perdent (ils s’échappent du produit pendant la transformation) et il faut donc redonner du goût au produit fini… Enfin, ça c’était vrai au début de l’industrie ! Maintenant, c’est surtout l’attente des consommateurs à vouloir des goûts inédits dans des produits qui ne devraient pas avoir ces goûts qui poussent à ajouter des arômes (par exemple : des chips goût barbecue) ou des boissons.

On peut également cité d’autres secteurs utilisant les arômes : la pharmaceutique, la parfumerie, etc.

Le choix d’utiliser des arômes artificiels plutôt que de vrais plantes par exemple peut parfois être intéressant. Cependant, il est mieux, je trouve, d’utiliser la matière qu’on souhaite retrouver car, outre les arômes, on retrouve aussi d’autres composés qui peuvent être plus ou moins conservés par les procédés de création, notamment les vitamines et les minéraux.
Rappelons qu’un aliment « sain » n’est sain que parce qu’il apporte d’autres éléments que du sucre et du gras.

3 avis sur l'article “Les arômes (artificiels) ?”

  1. V0r4c3 dit :

    Très intéressant,

    Pour le coup, j’avais déjà saisi qu’un arôme (pur) naturel ou artificiel, c’était strictement la même chose, puisque la même molécule. Ce que beaucoup de personne ont du mal à comprendre.
    Par contre, oui souvent, un arôme naturel sera souvent plus agréable car constitué d’autres arômes, qui fourniront un ensemble plus complet qu’un arôme artificiel brut.

    Par contre, question que tu n’abordes pas : Comment arrive t’on à créer un arôme ?

    De plus, attention aux appellations « Arômes naturels », naturels oui mais pas produit par ce qu’il devrait être. Mais pas néfaste pour autant.

    Je n’ai pas compris cette formulation de phrase

    • Lokoyote dit :

      @V0r4c3 :

      Exactement, ce qui compte c’est la molécule. Et une molécule d’odeur n’est (a priori) pas mauvaise, elle sert juste de signal (jusqu’à preuve du contraire évidemment).

      J’ai hésité à parler de la création d’arômes mais c’était un peu fouillis et je viens de voir que le lien que j’avais mis a expiré depuis le temps…

      Pour y répondre il y a plusieurs manières :
      – La plus simple et la moins coûteuse : La chimie. On assemble des composés pour en créer d’autres qui auront une odeur. Un TP souvent fait à l’école est la synthèse d’arôme de banane. Vu que la chimie organique a ses limites, on cherche souvent à synthétiser des molécules peut coûteuses et donc simples.
      – La plus complexe : la biotechnologie. On se sert de microorganismes pour synthétiser de manière naturelle des arômes, soit en modifiant leur génomes, soit par des procédés de fermentation par exemple où le microorganisme en question va se développer et créer des arômes tout seul. C’est pas exemple le cas dans les vins nouveaux type Beaujolais qui sentent souvent la « banane haribo » ou la « fraise tagada », mais aussi les différents arômes qu’on ressent justement dans un vin en général qui sont tout sauf du raisin. Il faut ensuite extraire les arômes et les concentrer.
      – Une autre voie de la biotechnologie est d’utiliser des enzymes pour forcer des réactions de synthèse et être extrêmement efficace. On part souvent d’un précurseur n’ayant pas d’odeur seul mais qui, une fois transformé, va en avoir. Encore faut-il trouver les molécules en question !

      Concernant ma phrase floue c’est surtout pour le cas de la création de l’arôme de fraise dit « arôme naturel » créé à partir d’une pâte de copeaux de bois australien, d’eau et d’alcool, et aussi de l’arôme « noix de coco » tiré d’un champignon apparemment. Mais comme dit plus haut, c’est la molécule qui compte au final.

      Je peux laisser quelques liens ici :
      http://www.selectarome.com/fr/notre-metier/fabrication-aromes-naturels
      http://lesaromes.free.fr/Pages/industrie.htm

  2. Matronix dit :

    Merci c’est intéressant, c’est vrai que c’est mystique ces odeurs qu’on ne peut pas mesurer !

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